CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION |
Statut au Canada |
Raisons d'ordre humanitaire |
Phuti c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)
IMM-3917-99, IMM-5048-99
juge Lemieux
12-7-00
19 p.
Demandes de contrôle judiciaire de deux décisions distinctes que des agents des visas ont prises dans le contexte du refus de la demande de résidence permanente au Canada que la demanderesse, Phema Phuti, une citoyenne de l'Inde qui vit toujours dans ce pays, a présentée--La demanderesse a travaillé pour M. et Mme Manucha pendant trente ans, et elle les accompagnait lorsqu'ils se rendaient à l'étranger à l'époque où M. Manucha était agent du service extérieur du gouvernement de l'Inde et, plus tard, ambassadeur de ce pays--Quand M. Manucha a pris sa retraite, lui et son épouse sont devenus des résidents permanents du Canada--En 1992, Mme Manucha, dont l'époux était décédé, a entamé des démarches en vue de parrainer la demande de droit d'établissement de la demanderesse au Canada et d'obtenir que cette demande soit accueillie sur la base de motifs d'ordre humanitaire liés à la demanderesse et à elle-même--La première question litigieuse était de savoir si le défendeur a violé l'obligation d'agir équitablement qui lui incombait vu la façon dont ses fonctionnaires ont traité la demande--La demanderesse soutient que le défendeur a violé l'obligation d'agir équitablement qui lui incombait en raison de l'omission de l'agent des visas Beaupre de faire part à la demanderesse et ses répondants au Canada des réserves qu'il avait au sujet de la demande et du fait qu'il ne leur a pas donné l'occasion de répondre à ces réserves--La demanderesse avait droit à ce que l'on respecte l'obligation d'agir équitablement à son égard en traitant sa demande de résidence permanente au Canada--La décision de l'agent des visas a une incidence sur les droits, privilèges ou intérêts de la demanderesse, et cela est suffisant pour entraîner l'application de l'obligation d'agir équitablement--L'obligation d'agir équitablement a été violée en l'espèce, tant sur le plan de l'obligation de l'agent des visas de faire part de ses réserves que sur celui du droit de la demanderesse d'y répondre--La question de la santé financière de la demanderesse au Canada était au coeur de la décision de M. Beaupre de ne pas accorder la dispense prévue à l'art. 2.1 du Règlement sur l'immigration--Le haut-commissariat du Canada (HCC) a agi de façon injuste en refusant la demande de résidence permanente au Canada de la demanderesse dans les circonstances sans à tout le moins les informer, elle et son répondant, du fait que la question du soutien financier et de l'engagement de ce dernier était devenue problématique et sans leur donner l'occasion de répondre à ces réserves--Il n'était pas convenable de rendre une décision sans respecter les garanties procédurales applicables, soit la communication des réserves et le droit d'y répondre--La deuxième question litigieuse était de savoir si les fonctionnaires du défendeur ont agi illégalement en rouvrant une décision favorable--Si la demanderesse avait gain de cause au regard de ce deuxième moyen, elle pourrait être admise au Canada--L'avocat de la demanderesse soutient qu'une fois qu'une décision a été prise, cette décision ne peut être rouverte en l'absence d'un pouvoir légal permettant cela sauf s'il s'agit de remédier à un déni de justice naturelle--Le fondement légal de cet argument est l'existence, dans le Règlement sur l'immigration, de deux pouvoirs permettant de déroger au processus habituel de sélection sur la base de critères de sélection définis objectivement--La première exception se trouve à l'art. 2.1 du Règlement sur l'immigration--La deuxième exception se trouve à l'art. 11(3) du Règlement sur l'immigration--La Cour ne peut accepter la prétention du ministre selon laquelle certaines décisions que les agents des visas ont prises au sujet de la demanderesse avant qu'on lui envoie une lettre de refus en bonne et due forme en 1998 étaient strictement de nature interne--Compte tenu de l'arrêt Chandler c. Alberta Association of Architects, [1989] 2 R.C.S. 848, on ne pouvait contester l'exercice favorable que l'agent des visas a fait de son pouvoir discrétionnaire en l'absence de violation de la justice naturelle, ce qui est le cas en l'espèce--Demandes accueillies--Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, art. 2.1 (édicté par DORS/93-44, art. 2), 11(3) (mod. par DORS/81-461, art. 1).