BREVETS |
Contrefaçon |
Trojan Technologies, Inc. c. Suntec Environmental
T-1811-01
2003 CFPI 825, juge Gibson
7-3-03
46 p.
Requête en jugement sommaire--La demanderesse, Trojan Technologies, Inc. (Trojan), est une société ontarienne--Elle a pour activités la recherche et développement, la fabrication, la vente, l'installation, l'entretien et les services de consultation concernant les systèmes de traitement de l'eau à l'aide de rayons ultraviolets--Trojan est titulaire du brevet canadien no 1327877 (le brevet en cause), délivré le 22 mars 1994 pour l'invention de Jan Maarschalkerweerd intitulée «Dispositif de purification des fluides»--La défenderesse Suntec Environmental Inc. (Suntec) est une société constituée en vertu de la loi fédérale canadienne dont l'entreprise consiste en la fabrication, la vente, l'installation et l'entretien de systèmes et d'appareils de désinfection des eaux à l'aide de lumière ultraviolette--Elle fait également affaire aux États-Unis et au Japon par l'intermédiaire de sociétés affiliées--Trojan a déposé sa demande de brevet le 16 août 1989 et a revendiqué une priorité en date du 13 septembre 1988, fondée sur le dépôt d'une demande de brevet équivalent aux États-Unis--La demande comprend 65 revendications--Les questions soulevées par la requête ont trait 1) aux principes généraux régissant les requêtes en jugement sommaire, 2) à la propriété et à la validité du brevet et 3) à l'existence d'une contrefaçon par Suntec--1) Les principes applicables pour statuer sur les requêtes en jugement sommaire ne sont pas contestés--Le juge Gibson a appliqué les principes énoncés dans Apotex Inc. c. Canada, [2003] A.C.F. no 593--2) En matière d'interprétation de brevets, il faut considérer que les revendications et l'abrégé d'un brevet s'adressent à un travailleur versé dans l'art et doivent être interprétés par une personne déterminée à comprendre et non le contraire--Un brevet doit recevoir une interprétation téléologique plutôt qu'une interprétation entièrement littérale résultant d'une analyse minutieuse du brevet--Le recours au mémoire descriptif d'un brevet pour aider à l'interprétation de ses revendications, s'il est permis pour faciliter la compréhension des termes utilisés, n'est pas nécessaire lorsque le libellé est clair et non équivoque et il ne saurait modifier la portée des revendications--La date pertinente pour l'interprétation d'un brevet est la date de sa délivrance-- Relativement à l'interprétation des revendications 36 et 42, la seule question litigieuse se rapporte à la signification des mots «un fil électrique» et «ballast étant incorporé dans ledit cadre» de la revendication 36 et du mot «comprenant» dans la revendication 42--L'expression «fil électrique» a le sens de toute combinaison d'un tel fil conducteur d'électricité ordinaire et de tout autre moyen conducteur qui aboutirait au même résultat, soit un tel fil à lui seul, soit un autre moyen conducteur à lui seul; l'expression «un ballast incorporé dans ledit cadre» comprend un ballast monté sur le cadre par un moyen quelconque de fixation; le terme «comprenant» a le sens de «traiter ou considérer comme faisant partie de l'ensemble»--La variante préférée de l'invention en cause correspond entièrement aux revendications 36 et 42 et est donc visée par les revendications découlant des revendications 36 et 42--La date de l'invention est pertinente tant pour l'évaluation du caractère évident que pour celle de la paternité de l'invention--Trojan n'a pas démontré selon la prépondérance des probabilités et par preuve probante que la date de l'invention était antérieure à la date de priorité établie pour le brevet--Concernant l'analyse de la preuve soumise relativement à chacun des éléments sur lesquels Suntec a fondé sa défense d'invalidité, la Cour a jugé, premièrement, au sujet de l'antériorité, que la preuve produite était suffisante pour conclure que le brevet américain ne contenait pas d'indications d'une clarté telle qu'une personne de métier qui en prend connaissance et s'y conforme «arrivera infaillible-ment» à l'invention faisant l'objet de la revendication 36 du brevet--Deuxièmement, au sujet de l'évidence, la Cour a conclu que Suntec ne s'est pas acquittée du fardeau de démontrer que, compte tenu de l'état de la technique et des connaissances générales à la date de l'invention indiquée au brevet, le technicien fictif, sans esprit inventif, mais versé dans l'art pertinent arriverait infailliblement à la solution décrite par le brevet--Troisièmement, Suntec n'a pas démontré que la paternité de l'invention faisant l'objet du brevet n'est pas attribuable à Jan Maarschalkerweerd--3) Pour déterminer s'il y a eu contrefaçon, il faut déterminer, sur la base d'une «interprétation téléologique plutôt que l'interprétation purement littérale», si l'«essence» du brevet, plus particulièrement des revendications 36 et 42, a été reprise dans le design et le montage du système de désinfection de l'eau de Suntec--La preuve ne permet pas de conclure que le système de Suntec a été fabriqué, vendu ou offert en vente au Canada--Aucune des trois variantes sur lesquelles s'appuyait Suntec ni l'ensemble de celles-ci, n'est suffisant pour différencier le système de Suntec des revendications du brevet en cause--Les variantes du système de Suntec auraient été évidentes pour un lecteur du métier à la date de publication du brevet en cause, et celui-ci n'aurait pas interprété le libellé des revendications 36 et 42 comme indiquant que le titulaire du brevet visait la stricte conformité avec les éléments de ces revendications qui sont contraires aux variantes constituait une condition essentielle de l'invention--Compte tenu des principes applicables aux jugements sommaires, les demandes présentées par Trojan dans le présent litige ne soulèvent aucune question véritable à débattre, et l'issue de ces questions ne requiert pas l'examen plus approfondi d'une instruction complète--Il est possible de déterminer quels sont les faits nécessaires, et il n'y a pas de question sérieuse de crédibilité--Le brevet en cause, et plus particulièrement les revendications 36 et 42 et les revendications qui en découlent, sont valides--La date de priorité invoquée eu égard au brevet en cause est la date la plus ancienne sur laquelle Trojan peut étayer son argument--Le brevet en cause n'est pas nul en raison de l'antériorité ou de l'évidence, et M. Jan Maarschalkerweerd est correctement identifié à titre d'auteur de l'invention--Enfin, le brevet en cause et plus particulière-ment la revendication 36 et les revendications 38 et 40 qui en découlent, ainsi que la revendication 42 et les revendica-tions 46, 47, 61, 64 et 65 qui en découlent, ont été contrefaits par Suntec--Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4.