DROIT ADMINISTRATIF |
Contrôle judiciaire |
Therriault c. Canada (Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)
T-2085-01, T-2084-01
2003 CFPI 439, juge Blais
16-4-03
22 p.
Deux demandes de contrôle judiciaire présentées à l'encontre des décisions du sous-ministre adjoint des Services fonciers et fiduciaires du Ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada rejetant, premièrement, le grief numéro QUE-00-04, et deuxièmement, le grief numéro QUE-00-05 de la demanderesse--Les griefs faisaient suite à une plainte de harcèlement dirigée contre la demanderesse, une gestionnaire, par une employée, Mme Picard--La plainte s'est révélée non fondée quant à 19 des 20 allégations; on lui a donc adressé une lettre de réprimande pour avoir attaqué la crédibilité et insulté la plaignante--QUE-00-04 demandait des sanctions disciplinaires contre les personnes fautives et des dommage-intérêts compensatoires; QUE-00-05 contestait la lettre de réprimande--En rejetant les griefs de la demande-resse, après qu'ils eurent été rejetés aux deux premiers paliers, le sous-ministre adjoint a-t-il commis une erreur de droit ou de faits, justifiant l'intervention de cette Cour?--Tout d'abord, en ce qui a trait au grief QUE-00-04, l'analyse est divisée en deux-- Premièrement, le droit de se faire entendre de la demanderesse a-t-il été nié?--Après une enquête qui s'est étendue sur 8 mois, on a donné 7 jours à la demanderesse pour répondre au rapport concluant qu'il y avait eu harcèlement--Malgré la demande de report de la rencontre, on a décidé, après ces 7 jours, d'accepter les conclusions du rapport d'enquête--La décision d'accepter les conclusions du rapport d'enquête prises le 22 juin 2000 que la décision de remettre une lettre de réprimande à la demanderesse le 29 juin 2000 étaient toutes deux intempestives et déraisonnables dans les circonstances-- Il est manifeste que le long rapport d'enquête contenant une analyse détaillée des 20 allégations de harcèlement à l'endroit de la demanderesse pouvait aisément justifier le report de la rencontre fixée le 21 juin 2000, afin de permettre à la demanderesse de faire le point et de demander conseil--Le fait pour son superviseur de ne pas tenir compte de la situation particulière dans laquelle se trouvait la demanderesse constitue un manquement flagrant à la politique quant aux droits des intervenants--Il est manifeste que la demanderesse a été privée de son droit d'être entendue--Pour n'en avoir pas tenu compte, le sous-ministre adjoint a commis une erreur justifiant l'intervention de la Cour--Deuxièmement, le sous-ministre adjoint était-il justifié de conclure qu'il n'y avait rien dans le processus ou le contenu de l'enquête qui indiquait que la plainte de Mme Picard était abusive ou vexatoire?--Compte tenu du fait que 19 des 20 allégations de harcèlement ont été rejetées et de l'effet préjudiciable de telles accusations, le sous-ministre adjoint aurait pu examiner de plus près la plainte de harcèlement et déterminer si elle pouvait être considérée comme abusive et vexatoire--Le superviseur de la demanderesse et la conseillère en ressources humaines ont insisté auprès de la demanderesse pour qu'elle ne dépose pas de grief, au moment où elle avait appris le dépôt du grief de Mme Picard alors que la demanderesse souhaitait ardemment le faire--En plus de constituer une ingérence dans les droits fondamentaux de la demanderesse, cette intervention de la conseillère en ressources humaines en présence du supérieur immédiat de la demanderesse constitue un abus de pouvoir évident qui a pu contribuer à entacher tout le processus qui a suivi--La procédure utilisée était donc viciée--Lorsque l'opportunité s'est présentée à lui, le sous-ministre adjoint aurait pu tenter de corriger ce vice procédural afin d'obtenir l'image complète du litige devant lui--Or, il n'a pas cru bon de le faire--L'intervention de cette Cour est donc justifiée-- L'absence d'analyse factuelle par le sous-ministre adjoint et d'ajout de faits ou d'éléments nouveaux a coloré irrémédiablement l'analyse qui ne pouvait plus être équitable à l'endroit de la demanderesse--En ce qui concerne le second grief QUE-00-05, dans les faits, la mesure disciplinaire imposée à la demanderesse le fut en raison de la conclusion de l'enquêteur ministériel qu'elle avait tenu, à une seule occasion, des propos rencontrant la définition de harcèlement de la Politique sur le harcèlement en milieu de travail-- Considérant la conclusion que, d'une part, la demanderesse a été privée de son droit de se faire entendre, et d'autre part que le sous-ministre adjoint ait, non seulement omis de considérer le comportement de Mme Picard tout au long de ce processus, mais également celui des représentants appropriés de la direction ou des surveillants, la réprimande écrite n'était pas appropriée dans les circonstances--La demanderesse a le droit d'être rétablie dans l'état où elle était avant l'imposition de la mesure disciplinaire--Les demandes sont accordées.