[2012] 3 R.C.F. F-11
PEUPLES AUTOCHTONES
Requête en vue d’obtenir une injonction interlocutoire interdisant la mise en oeuvre d’une décision (la Politique) du ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada (AADNC), qui exige que les Premières nations administrant de l’aide au revenu fournie à des personnes vivant dans des réserves à l’Ile‑du‑Prince‑Edouard, en Nouvelle‑Ecosse et au Nouveau‑Brunswick le fassent à des taux et selon des normes identiques à ceux établis par les provinces dans lesquelles se trouvent les Premières nations—Cette exigence tire sa source d’une directive du Conseil du Trésor datée de 1964—Cependant, depuis 1991, AADNC et les Premières nations n’observent plus cette directive—Les manuels sur les programmes régionaux et nationaux d’AADNC établissaient les taux de l’aide au revenu dans les réserves et les critères d’admissibilité à cette aide, et les taux suggérés n’étaient pas identiques à ceux des provinces; ils énonçaient aussi que l’aide au revenu serait fournie selon des normes raisonnablement comparables à celles appliquées dans la province ou le territoire où la réserve était située—Le projet de manuel des programmes sociaux pour le Canada atlantique de 2011 ne fait pas mention de la « comparabilité raisonnable », mais énonce plutôt que le programme d’aide au revenu dans les réserves est administré en appliquant la même échelle de taux et les mêmes critères d’admissibilité que ceux utilisés pour les résidents hors réserve—Cependant, en janvier 2012, AADNC a fait savoir que ce manuel ne serait pas utilisé et serait remplacé par un manuel national révisé—Ce manuel prévoit que les programmes sont dispensés selon des normes « raisonnablement comparables » à celles en vigueur dans la province de référence, mais que les montants payables au titre de l’aide au revenu seront équivalents aux taux en vigueur dans la province de référence—Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de la Politique—Le critère pour le prononcé d’une injonction interlocutoire a-t-il été rempli?—La baisse estimée des montants d’aide au revenu sous le régime de la Politique et l’inadmissibilité éventuelle causeront à certains bénéficiaires un stress émotif et psychologique équivalant à un préjudice irréparable—Les personnes dépendant d’une aide au revenu sont particulièrement vulnérables, même aux petits changements dans les ressources dont elles disposent poursatisfaire leurs besoins essentiels—La prépondérance des inconvénients favorise les demandeurs, car la conformité n’est pas une question urgente, étant donné qu’AADNC et les Premières nations sont dans une situation de non-conformité depuis plusieurs années—Il existe une question sérieuse à trancher, compte tenu des répercussions importantes de la Politique pour les bénéficiaires et du fait que les demandeurs s’attendaient à être consultés avant que la Politique soit adoptée—Requête accueillie.
Première nation d’Elsipogtog c. Canada (Procureur général) (sub nom. Simon c. Canada (Procureur général)) (T-1649-11, 2012 CF 387, juge Simpson, motifs de l’ordonnance en date du 2 avril 2012, 28 p.)